Il y a eu un nombre incalculable d’articles et de livres relatif à la fin du règne de la Chine en tant qu’usine du monde. Il est vrai que l’augmentation des salaires a rendu la Chine moins compétitive dans les industries bas de gamme telles que le textile face à des pays low cost comme le Vietnam, le Cambodge et le Bangladesh. La Chine demeure toutefois l’une des plus importantes sources d’approvisionnement pour les produits de milieu à haut de gamme. Par exemple, les exportations d’équipements lourds de la Chine ont connu un taux de croissance d’environ 30 pourcent dans la dernière décennie. Même si l’industrie bas de gamme diminue, le pays se repose davantage sur une supply chain compétitive que sur le prix du travail. La Chine détient un ensemble de facteurs-clés qui contribuent à ce qu’elle soit un exportateur compétitif même si le paysage économique a évolué. Ils comprennent:
- Infrastructure de haute qualité (notamment pour les infrastructures liées à l’export): Les transports ferroviaires et les routes de Chine, notamment au niveau des villes côtières, sont parmi les plus développées au monde. Avec un historique d’investissement à double chiffre dans l’infrastructure, les ports Chinois complètent les infrastructures ferroviaires et routières. Shanghai a depuis longtemps surpassé Singapour en tant que port le plus occupé au monde et il faudra du temps pour que des pays puissent rivaliser avec la Chine en terme d’infrastructures (qui continuent à se développer)
- Augmentation de la force de travail qualifiée: La Chine produit des centaines de milliers d’ingénieurs et de scientifiques diplômés chaque année qui sont ensuite embauchés dans les industries locales. De plus, la Chine détient la plus importante population d’étudiants à l’étranger au monde avec une grande partie qui retourne au pays à la fin de leurs études. Même si l’importance a été donnée à la qualité plutôt qu’à la quantité en terme de diplômés, l’augmentation du niveau d’éducation va développer la compétitivité de la Chine face aux autres destinations low cost
- Augmentation des dépenses en recherche et développement conduisant à une meilleure capacité d’innovation: Malgré la réputation en contrefaçon, l’innovation en Chine a continué de se développer. A rapport rendu par McKinsey & Company (Greater China) met en avant l’innovation dans des secteurs tels que l’énergie renouvelable, l’électronique grand public, la messagerie instantanée et la technologie mobile. Comme la concurrence interne et externe augmente, la Chine doit également se concentrer sur la réduction des prix, l’adaptation des business modèles et le développement de la supply chain. Cela conduira à l’élimination des entreprises les moins efficaces, tant locales que sur le marché de l’export.
- Moins de coûts relatifs aux pays industrialisés: Malgré une croissance à deux chiffres dans les salaires et la valeur de la monnaie au cours de la dernière décennie, le salaire minimum en Chine est toujours inférieur à celui des pays industrialisés. L’augmentation des salaires est liée à l’augmentation de la productivité. C’est la raison pour laquelle les pays en concurrence avec la Chine sur les couts bas devront également la concurrencer en augmentant leur productivité et vice versa.
- Spécialisation, pas uniquement au niveau du secteur, mais également au niveau du produit: La spécialisation de la Chine dans différents produits reste inégalée au monde. Il existe des villes entières dédiées à la fabrication d’un simple produit. Par exemple, Shenyang, une ville au nord-est de la province du Liaoning, s’est forgé une réputation dans son industrie lourde, et notamment dans la fabrication de voiture et de machines légères. Le Delta de la rivière des perles (Pearl River) est connu pour les industries du textiles et de l’électronique, alors que Shenzhen est devenu le centre IT de la Chine. De plus, la gamme de produit disponible dans ces agglomérations est diverse, de bas à haut de gamme, une différenciation qui constitue un facteur de compétitivité.
- Des politiques pro-exportation: Il est vrai que les autorités chinoises ont décidé d’altérer le modèle de croissance mené par l’exportation pour un modèle tourné vers la consommation locale. Toutefois, la politique « going out » du pays combinée à une augmentation de la saturation du marché local, notamment dans des secteurs liés aux investissements en immobilisations comme dans l’acier, le ciment et l’équipement lourd continue d’avoir un soutien explicite (via des rabais ou des subventions à l’exportation) ou un soutien implicite (obstacles élevés à l’entrée, exigences de licences), notamment au niveau local. Ce soutien continuera à développer la compétitivité de la Chine au moins à court terme.
Un décalage vers l’intérieur : Comme les zones côtières sont devenues chères, des zones telles que Chengdu et Chongqing qui sont éloignées de la côte continuent de bénéficier d’une augmentation des investissements directs de la part à la fois d’entreprises locales et étrangères. Cela ne veut pas dire que le décalage n’est pas sans souci, mais avec le temps il se révèlera plus facile de se déplacer à l’intérieur même de la Chine qu’à l’étranger.
Cet article est paru à l’origine dans le Chinafrica Magazine,Pourquoi la Chine reste-t-elle une destination majeure?